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iBionext, l’inspirateur des startups en Tech-Santé
Alexia Perouse
ENTREPRENEURES

iBionext, l’inspirateur des startups en Tech-Santé

Alexia Perouse

Alexia Perouse, co-fondatrice de iBionext

Depuis bientôt 5 ans, au coeur de Paris, iBionext bouscule le monde des HealthTech (Tech-Santé) avec une formule inédite dans la fabrique de startups. Le «studio » est un modèle hybride entre un fonds et un incubateur, inventé par Bernard Gilly et Alexia Perouse : Une sorte de 3 en 1, afin de concilier création, construction et financement. Créée en 2015, la plateforme qu’ils ont lancée, a déjà accompagné 8 sociétés, très innovantes,  dont deux déjà sont cotées en Bourse. Et bluffe le monde de la science.

«Lors de la création d’IBionext, en 2015, on est parti d’une feuille blanche, explique Alexia Perouse. Nous avions la conviction d’avoir des pépites en France dans la recherche fondamentale ou clinique, notamment dans les technologies de rupture en santé, mais notre pays n’offre toujours pas les moyens des grands fonds de croissance pour les accompagner et les libérer». Permettre l’éclosion, puis la maturation et enfin l’accélération nécessaire de startups dans le secteur de la santé où les cycles de recherche sont très longs : voilà le projet. Avec 3 associés, dont Bernard Gilly, elle crée un écosystème sur le modèle américain, encore inédit en France.

Frêle et déterminée, Alexia Perouse a le goût de la conviction, l’expérience et la capacité de lever des fonds, après un long parcours de gestionnaire de fonds. Elle sera naturellement la cheville ouvrière des montages financiers. Ex-associée de la société Omnes Capital, gestionnaire de capital risque, elle a toujours financé des sociétés innovantes. « Avec toujours un pied dans la santé », tient à rappeler cette neuroscientifique de formation. Jeune, elle a viré de bord, abandonnant la recherche médicale pour faire une école de management (IAE), puis rapidement elle choisit les métiers à hauts risques d’investisseur et de gestionnaire de fonds.

Epauler des projets innovants en santé, pour Alexia Perouse, c’est donc une vocation retrouvée. Retour aux sources pour cette experte pointue, vingt ans plus tard, avec un modèle opérationnel innovant qui donne  leur chance à des startups fabuleuses. En moins de 5 ans,  iBionext a levé plus de 360 M€ pour ses start-ups et généré 7 essais cliniques dans le monde. « Les fenêtres d’opportunités pour accélérer les startups innovantes sont très courtes : il faut pouvoir injecter beaucoup de capitaux, et au bon moment », dit sobrement cette experte.

Un projet mûri à travers 3 sociétés

L’aventure commence à travers 3 sociétés, bien avant la levée de fonds qui  permettra de formaliser  le modèle du start-up studio. En 2012, Alexia Perouse investit dans Pixium Vision, une société créée par un ancien de Biomerieux, Bernard Gilly,  avec des chercheurs de l’Inserm et de l’Institut de la Vision. Pixium innove avec un  système de restauration visuelle pour les aveugles, grâce à  un implant rétinien. Une révolution. Elle réédite le pari deux ans plus tard, en misant sur Gecko, une startup dirigée par Christophe Bancel, lui-même venture partner du Fonds. La jeune pousse, créée cette fois avec deux chercheurs du MIT, va mettre au point en France, une glue chirurgicale, permettant d’éviter les sutures en chirurgie. Entre temps, troisième coup de maître, Gensight, société spécialisée en thérapie génique, lève des fonds auprès d’investisseurs internationaux et sera rapidement cotée à l’instar de Pixium. Trois étapes, trois paris réussis.

Ces succès préliminaires servent de déclic. «  Il nous est apparu évident,  explique Alexia Perouse, qu’un fonds dédié permettrait à l’équipe de pousser d’autres technologies d’avenir que nous pouvions repérer dans notre  réseau,  et les incuber dans des sociétés dédiées». En 2015, les 4 associés créent la société de gestion iBionext, qui se présente d’abord comme une fabrique de startups dans les technologies de santé.

La fabrique

« iBionext n’accueille pas de start-ups déjà lancées, explique Alexia Perouse. Il les crée de A à Z : nous avons une approche totalement  entrepreneuriale. Nous travaillons en amont avec les porteurs des projets d’entreprise, nous nous impliquons  pendant des mois, et rentrons dans l’intimité des projets pour baliser le terrain. Ensuite, nous finançons pour partie la première levée de fonds mais nous avons surtout la capacité d’investir et d’accélérer la croissance des sociétés avec des tickets pouvant aller jusqu’à à 15 millions d’euros, voire plus. On leur donne du temps pour de ne pas entrer trop tôt en Bourse. Nous visons de détenir 35 % à 40 % du capital et de nous renforcer plutôt que de nous laisser diluer par des nouveaux entrants à la recherche de coups rapides».

Pour maintenir ses standards exigeants, iBionext ne suit que des projets haut de gamme, de  grande inventivité : restaurer la vue à travers la perception des formes pour les aveugles (GenSight); ralentir la dégénérescence des cellules du cerveau (BrainEver) …. L’éventail est resserré.

Très proche de l’Institut de la Vision, le «start-up studio» loge dans des bureaux modernes donnant sur un vaste patio : une cour secrète de la rue du Faubourg Saint Antoine, Passage de l’innovation. C’est cette proximité  qui a permis le lancement des deux premières startups, spécialisées sur la vision, avant que iBionext n’élargisse le spectre à d’autres technologies issues du neuro-morphisme ou à d’autres changements de paradigme.

Des réponses disruptives à des besoins thérapeutiques

 » On organise ensemble notre réflexion autour de grandes questions liées à la santé, explique Alexia Perouse, puis on cherche si des réponses réellement disruptives existent pour répondre à des besoins thérapeutiques encore non couverts pour les patients.  »

Après Pixium, qui crée des rétines artificielles, la première à être cotée, GenSight est introduite en Bourse à son tour : elle mise sur une toute nouvelle thérapie génique  pour lutter contre les maladies neurodégénératives de la rétine.  Cinq autres start-ups, Prophesee (Ex-Chronocam), Chronolife, Tilak Healthcare, BrainEver, Grai Matter Labs (ex-Brainiac) sont actuellement en phase de développement, ou en phase d’essais cliniques.  Un sixième et dernier projet est en train d’être financé et devrait rejoindre les équipes du studio iBionext dès septembre.

Car pour adhérer au projet, l’équipe d’iBionext doit d’abord y croire. Leur défi est d’apporter des réponses pointues et efficientes, à des questions complexes, en donnant aux chercheurs les moyens – et du temps – pour développer des prototypes. « Peut-on prédire qu’un insuffisant cardiaque va avoir un infarctus dans les 2 heures ? » se demandent-ils par exemple, avant de miser sur Chronolife, une startup qui innove avec des vêtements connectés validés cliniquement.

Contre la dégénérescence du cerveau, iBionext parie sur des découvertes majeures d’un neurobiologiste français de renom, Alain Prochiantz, relatives à l’utilisation des homéo-protéines pour bloquer le processus de mort cellulaire et lance la société BrainEver… Un premier traitement qui cible la maladie de Parkinson est en cours de développement, après la validation des essais précliniques. Grai Matter Labs (Ex-Brainiac), lui, s’attaque carrément au développement d’un ordinateur neuronal face aux équipes de recherches des plus grands…

Un réseau de chercheurs

Grâce à leur réseau, les fondateurs du «studio» repèrent d’abord les chercheurs innovants à travers les publications les plus intéressantes, et engagent avec eux un vrai marathon. Le scénario est millimétré. Vérifier sur le marché potentiel les applications ou les traitements thérapeutiques possibles, anticiper sur les questions difficiles des brevets aux essais cliniques, créer une équipe, penser à la fabrication : iBionext fait de la haute couture.

Tout de suite abritées au Passage de l’Innovation,  les  startups profitent aussi de services mutualisés  –  ressources humaines,  comptabilité, cantine…Ce ne sont pas moins de  160 emplois hautement qualifiés qui ont été créés dans cet écosystème.  Les employés sont des ingénieurs, des biologistes, des médecins, des data-scientistes, des programmeurs…. Outre ce vaste réseau d’experts, les startups  disposent  aussi de  vrais moyens de recherche : deux laboratoires, l’un dédié à l’optique et à l’informatique, l’autre pour les expériences biologiques.

Le studio permet également aux sociétés de travailler ensemble. Prophesee collabore ainsi avec GenSight, sur les applications de caméras, imitant le fonctionnement de la rétine, et s’est rapprochée de Pixium pour les implants …

« Nous sommes tous dans les mêmes locaux, cela crée des liens au quotidien. Au-delà de la recherche de financement, nous les accompagnons au jour le jour. Nous polissons de véritables bijoux, pour qu’ils soient mieux valorisés sur le marché, à leur potentiel réel et non selon les aléas du marché par exemple », explique Alexia Perouse.

Un deuxième fonds de 100 millions d’euros

Fort de ces succès, iBionext a clôt son 1er fonds et  ouvre actuellement un deuxième fonds qui devrait être doté d’une centaine  de millions d’euros. Avec toujours le même objectif, en plus grand : créer, incuber et accélérer un nombre restreint mais hautement qualifié  de projets.

« Nous avons encore plusieurs projets dans notre cible, quitte à pousser les murs, dit Alexia Perouse. Pour développer le modèle, il nous faut le structurer pour le pérenniser, et étoffer l’équipe aussi. En fait, iBionext est aussi une start-up en soi !».

Car le modèle suppose face à de grands chercheurs, de trouver des grandes personnalités pour les accompagner. En début d’année, Alexia Perouse a reçu ainsi le trophée de la dirigeante #Let’sgoFrance  de PWC, prix donné à la femme qui incarne le mieux le leadership à la française. Elle n’a pas pris la grosse tête, mais reconnait sa satisfaction. Si cela fait avancer « sa » cause : avoir un impact positif   sur l’éclosion de nouvelles startups et amener des solutions innovantes le plus tôt possible aux patients…


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